Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

05/03/2009

Les Académiciens belges font preuve d'humour et d'autodérision

Palais_aca_bxl_400_300.JPGLes éminents membres de l'Académie royale de langue et de littérature ne sont pas rancuniers et le moins qu'on puisse dire est qu'ils ont un sens poussé de l'autodérision. En effet, voilà que j'apprends par un joli courrier frappé du sceau de cette vénérable institution que l'Académie attribue le Prix Franz De Wever à mon recueil de nouvelles « Nous sommes tous des playmobiles ». Voilà le genre de courrier qui me réjouit !

La remise des prix aura lieu ce vendredi à 18h au Plais des Académies et je ne pourrai y être car on m'a prévenu un peu tard.

La question qui se pose, tout de même est de savoir si l'on va lire un extrait du livre primé lors de la cérémonie.

Ce serait tout de même amusant de donner en lecture un passage comme celui-ci :

« Bruxelles n'a pas bronché. Elle a dû nous voir, pourtant, enfourner notre colis gigotant dans le fourgon blanc. Elle nous a vus nous asseoir à l'avant, faire chauffer le diesel puis démarrer. Elle a sûrement remarqué qu'on allumait l'autoradio et, si elle a de bonnes oreilles, elle a pu entendre que le présentateur interrogeait l'autre guignol de notre académie locale, l'Académie Royale comme elle s'appelle. Il parlait bien un bon français bien propre, sûr qu'on pourrait le rediffuser sur France Culture le lendemain sans choquer personne. « Je suis d'autant plus inquiet au sujet de cette disparition que notre éminent Académicien effectuait le déplacement depuis Paris expressément pour participer à notre journée de débats sur le Surréalisme en France et en Belgique,... » Surréalisme mon cul. C'est pas à Bruxelles, à moins de cinq cents mètres de la Fleur en Papier Doré qu'on nous fera avaler celle-là. Tous ces costardeux du Palais des Cacadémies, ils ne l'ont jamais vu le Surréalisme. Ils ont lu ce que d'autres en ont dit, peut-être, et encore, du bout des lunettes et avec des gants de cuisine pour pas se salir les doigts. Qu'est-ce qu'ils vont nous raconter? Qu'ils viennent de s'inscrire au Parti Communiste de Belgique, qu'ils ont bouffé de la mescaline dans leur chambre à coucher avec Michaux ou qu'ils ont tué un homme pour faire comme Arrabal ? Ah, non, bien sûr, le Surréalisme, c'est un mouvement, c'est une époque. Alors ils vont nous raconter comment ils ont plié leurs petits papiers, ces si exquis cadavres que les jeunes filles aiment tant, comment ils ont osé, une fois, laisser leur stylo Mont Blanc pondre deux phrases sans véritable arrière-pensée. Allez, les charognards, radotez là-dessus, si ça vous chante, nous on vous prépare un cadavre des plus exquis. »

Peu de textes ont dû se montrer jusqu'ici aussi virulents envers l'Académie française, en tout premier lieu, et à l'endroit de sa petite sœur belge, logée rue Ducale, à quelques centaines de mètres du Palais royal. J'étais déjà très amusé que cette nouvelle, Bruxelles insurrection, qui fut téléchargée plus de dix mille fois en version PDF du temps où je la diffusais gratuitement en ligne, figure dans un recueil disponible en librairie. J'étais flatté d'apprendre que ce recueil figurait parmi les trois finaliste du Grand Prix de l'Humour noir en 2008 (en compagnie de Robbe-Grillet et de Jean-Bernard Pouy, qui a obtenu le prix) mais je suis vraiment ravi que l'Académie le couronne.

C'est vraiment la récompense la plus inattendue qui soit.

Elle me donne des idées. Pour remporter le Goncourt l'année prochaine, je vais écrire un roman sur l'hygiène de chez Drouant, les couches bio taille adulte qu'on y trouve dans les toilettes pour les cas où les délibérations s'éternisent, les coucheries entre jurés, puis je les insulterai copieusement, eux et leur fonction, avec toute la mauvaise foi dont je suis capable.

Je n'aurai peut-être pas le Prix, en fin de compte, mais je me serai bien amusé.

C'est sans doute pour cela que les Académiciens belges ont bien aimé le recueil : il est plein d'humour. Juste comme eux, au fond !