04/08/2010
Rien à déclarer
J'était invité hier soir, à Lamalou-les-Bains, dans le cadre d'une semaine de Vagabondages littéraires. L'accueil était formidable, le lieu magnifique, le public (nombreux) très chaleureux. Vous allez me dire que si ce n'était pas le cas, je n'oserais pas l'écrire et vous aurez raison. Mais comme tout était réussi, pourquoi se priver de le dire, hein ?
Bon, ce n'est pas tout ça mais je voulais surtout vous raconter qu'en attendant le début de la rencontre, j'ai ouvert un livre qu'on avait posé devant moi car j'en avais écrit un bout et j'ai relu ce texte-ci, écrit il y a quelques années, suite à la demande d'Hervé Broquet qui me demandait de commenter l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme. Vous savez, l'article qui dit deux choses pour le prix d'une :
1.Chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la présente Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation.
 2.De plus, il ne sera fait aucune distinction fondée sur le statut politique, juridique ou international du pays ou du territoire dont une personne est ressortissante, que ce pays ou territoire soit indépendant, sous tutelle, non autonome ou soumis à une limitation quelconque de souveraineté.
Comme ce genre de texte ne me parle pas vraiment et que ce n'est pas ma lecture favorite, j'ai répondu ce qui suit. Je le partage avec vous, juste pour le plaisir.
Bonne lecture !
Je n’aime pas la langue des avocats
 La langue de fer la langue de bois
 Les droits de l’homme pas plus que le droit des marques
 Ou le droit à l’image
 Toutes ces langues je ne les comprends pas
 C’est comme les frontières
 Les calendriers
 Les factures
 Ce sont des inventions en cravate
 Pour plus besogneux que moi
 On me dit que les droits de l’homme
 Bla bla bla
 Et puis que tel article
 Bla bla bla
 Je ne vois que des mots opaques
 Des mots à cornières de métal
 Des mots armés
 Même si c’est contre l’injustice
 Les inégalités
 Ce ne sont jamais que des mots
 Et l’on ne vit pas de mots
 Ni de phrases
 Il en faut un peu plus
 Pour huiles les rouages
 Il faut de la chair tendre il faut des poils de pied
 Des regards et des ongles
 De l’humain qu’on respire
 Et puis qui sue aussi par moments par lâcheté
 Il en faut un peu plus
 Pour virer l’esclavage
 De l’homme par l’homme
 Que des mots que des paragraphes
 Même bien numérotés
 C’est qu’ils numérotent bien au greffe
 Ils ne savent faire que ça
 On ne trouve pas d’erreur
 Juges et avocats maîtres bouliers compteurs
 Mais la vie est ailleurs
 J’espère
 Que dans ces textes arides
 Un type avec son bide
 Franchit une frontière
 Un autre veut un boulot
 Mais il a la peau grasse
 Ou bien les cheveux roux
 On ne veut pas de lui
 Pas du tout
 Pas question dit la loi
 A qui on n’a rien demandé
 Même les roux gras on doit les engager
 Même les Andaluviens même les autonomistes de la république biélo-flamandes
 Les minorités à bretelles
 Les apatrides
 Les apparentés
 Et les de seconde zone
 Ceux qui n’ont pas un balle
 Et pas même un trou-de-balle
 Ceux-là aussi
 Même s’ils croient à Windows
 Au Grand Motoculteur
 A l’horoscope breton et au tarot flamand
 Même s’ils ont la peau bleue
 Des frères et sœurs par milliers
 Et qu’ils lèchent les vitres
 A la fin du souper
 C’est leur droit après tout
 Le droit d’être différent
 D’être sot d’être vieux
 D’être paralytique de vouloir le rester
 De bouffer le dessert en même temps que l’entrée
 Le champagne dans le verre à dents
 Les dents serrées
 Le bon vin et l’ivraie
 Le droit de tout mélanger
 De brasser
 D’embrasser le monde entier
 On doit tous les engager dit la loi
 On doit tous les écouter
 On doit faire comme si toutes ces différences n’en étaient pas
 Même si on n’a pas le temps
 Même si on n’a pas envie
 Eh bien moi je dis que cette loi elle ne me parle pas
 Comme toutes les lois du monde
 Tous les mots sont les mêmes
 Leurs sens se ressemblent se chevauchent et s’empêtrent
 Je ne sais plus que dire
 Je n’ai rien à écrire
 Je préfère le silence
 Le silence et la sieste
 Sont les vrais luxes sur terre
 Le reste n’est que triste gesticulation
 De mouches dans la purée
 Et même avec une cravate et devant la plus haute des cour
 Une mouche engluée reste une mouche inerte
 Je préfère le silence
 Quand on se tait
 Nous voilà tous égaux
 Même les bègues et les sourds qui ne parlent qu’allemand
 On peut enfin réclamer ce qui compte vraiment
 Le respect le respect le respect
 Même pour les gens
 Allez
 Oui
 Même pour les gens
Ce texte, avec la contribution de nombreux autres auteurs sur tous les autres articles de la déclaration est toujours en vente dans les bonnes librairies dans le recueil "Droits de l'Homme, j'écris vos noms", sous la direction, donc, d'Hervé Broquet, aux Éditions Couleur Livres. On le trouve par exemple chez Amazon mais partout ailleurs aussi, je ne vous encourage certainement pas à déserter les bonnes librairies, qui peuvent commander le livre sans problème.
PS : l'illustration n'a rien à voir, c'est un robot mixeur tout en un. Vous l'aurez sans doute remarqué.
PPS : Gerald de Murcia vient de m'envoyer quelques photos de la rencontre à Lamalou-les-Bains, j'en ai donc ajouté une à cette note, merci à lui pour cet envoi !
23:31 Publié dans À lire en ligne, Ecriture  | Lien permanent  | Commentaires (3)  | Tags : droits de l'homme,  article 2,  littérature,  poésie,  politique | 
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Commentaires
Il est vrai que le respect est beaucoup trop de travail pour un bon nombre de personne. C'est bien triste...
Écrit par : Tom De Brabandere | 05/08/2010
à quand les rencontres de fuveau ?
Écrit par : Lystig | 13/08/2010
Les rencontres de Fuveau ? Ce sera avec plaisir. Suffit que l'on m'invite et j'y cours !
Écrit par : Nicolas Ancion | 13/08/2010
Les commentaires sont fermés.