26/10/2008
Le blog d'Henri Michaux
Des questions idiotes, il m'en passe beaucoup par la tête. Celle-ci, par exemple : qu'est-ce qu'Henri Michaux aurait bien pu publier sur son blog ?
Bien entendu, les érudits et les pisse-froid me répondront que Michaux n'aurait jamais tenu de blog, lui qui ne voulait déjà pas que ses textes soient publiés au format poche et qui résistait, des quatre fers, pour que son œuvre ne soit pas accessible au plus grand nombre. Avec une posture pareille, on n'achète pas une Livebox ou Asus EEE pour bloguer sans interruption.
Encore moins un Iphone.
Pas même un vieux PC avec une connexion par modem téléphonique.
C'est sans doute vrai.
Mais comme Michaux l'écrivit très justement, même si c'est vrai, c'est faux.
Parce qu'il ne faut pas imagine le vieux Michaux, reclus et replié, quasi ermite, celui qui refuse de se faire photographier ou interviewer entrer dans une boutique de téléphonie ou un Apple Store, mais le tout jeune Henri, celui qui n'a pas encore traversé l'Atlantique, mieux encore, celui qui n'a pas quitté la Belgique. Après être passé à la Fnac, une fois branché son routeur sans fil et allumé son iBook, ne se sentirait-il pas autorisé à écrire et publier, d'où qu'il soit ? Internet et un blog gratuit ne suffiraient-ils pas comme tribune pour son imaginaire sans limite ou presque ?
Mettons que cette hypothèse tienne ; on en revient alors à la question du début : que publierait-il ?
- La nuit, je ne remue pas ? (essai sur le chat et les mondes virtuels)
- Un certain Clavier ? (les aventures poétiques d'un pauvre type perdu dans un monde qui lui échappe)
- Connaissance par les gaufres ? (une spécialité culinaire belge qui vaut bien la mescaline pour qui n'a pas beaucoup voyagé)
- Epreuves, exorcismes ? (son compte-rendu des soirées de week-end sur les télés du monde entier)
Oh, et puis non, une fois connecté à l'Internet, Michaux ferait sans doute comme des tas de types mal sociabilisé, il téléchargerait des films X, se ferait passer pour une gothique sur IMVU et se défoulerait en lâchant des commentaires poujadistes au bas des articles des grands quotidiens. Il perdrait ses plus belles heures à visiter des blogs au lieu d'écrire. Comme tout le monde ou presque. Comme vous, comme moi, par exemple.
Au fond, je me dis qu'Henri Michaux a bien fait de naître en son temps, de se barrer d'où il était né, de se replier, de s'exiler de tout, y-compris de lui-même, de ne pas tenir de blog, de ne pas afficher sa photo sur Facebook, de ne pas répondre à ses mails.
Allez, je vais éteindre mon ordi et me replonger dans Ailleurs ou dans Ecuador, je ne le regretterai pas.
21:03 Publié dans Notes de lecture | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : michaux, iphone, asus eee, poésie, henri michaux, plume, littérature | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer