01/05/2020
Le Poète perd son boulot (mais pas son temps)
On a montré la porte au Poète
C’est par là la sortie qu’on lui a dit
C’est la crise qu’on lui a dit
Nous n’avons plus besoin de vos services
Prenez vos clous prenez vos vis
Et fermez la porte derrière vous
Sans la claquer
Mais ce n’est pas le genre du Poète
De baisser les bras sans en couper quelques uns au passage
De baisser le front quand il se fait baiser profond
Il s’est assis devant la porte
Sans l’ouvrir
Et le silence s’est assis près de lui
Sans piper mot
Dans le bureau le bruit s’est répandu
Que le Poète ne disait rien
On a dit bien d’autres choses d’ailleurs
Qu’il était assis en tailleur
Qu’il attendait que vienne l’heure de découper les murs
Et de trouer les téléphones
On a dit qu’il avait plié son C4 en forme de bombardier allemand
La soute emplie de trucs radioactifs
Qu’il avait conchié les WC avec toutes sortes d’excréments
Dont deux de clients importants
Mais tout cela n’a aucun fondement
Le Poète s’est contenté d’ouvrir la porte
Un petit peu
De l’entrouvrir
Et de ne regarder ni de ce côté ni de l’autre
Mais juste entre les deux
Ce petit bout d’espace qui n’intéresse personne
Où tout se passe
Où tout résonne
Les bruits de couloirs
Les vents contraires et les tendances
Les vagues sur lesquelles on peut surfer
Celles sous lesquelles on s’écrase
Les pas de ceux qui les font
Et ceux qui n’en font pas
Qui s’en vont par la porte
Qui descendent l’escalier
Une dernière fois
Se retrouvent à la rue
Libérés pour de bon
Mais porteurs d’un tel poids
Comme écrasés sous le béton
Étranglés par la cravate
Pétrifiés par l’agenda
Ces rescapés du téléphone portable
Qu’ils raclent le trottoir avant de finir à la rue pour de bon
Le poète ne sera pas de ceux-là
Ils se contente de regarder entre les deux
L’espace ou rien ne se passe
Ça lui fait un bien fou de ne rien foutre
D’être un improductif
Un nain productif dans un pays de géants besogneux
Le travail ne produit jamais rien qu’une perte de temps
Raisonne le Poète
On ne crée pas de la valeur
A force d’acheter et de vendre
On prend juste l’argent dans la petite poche des uns
Pour le glisser dans la grosse poche des autres
C’est la loi de Lavoisier
Qui avait tout compris du commerce
Le Poète ne se contente pas de méditer
Il ne franchit pas la porte
Il ne fait rien tout simplement
C’est ce qu’il fait le mieux
Il a de l’endurance
Bientôt quarante ans d’expérience
Et jamais une erreur
Même si elles sont humaines
Et qu’il est plein d’humanité
Avec sa façon bien à lui de regarder en biais
La lumière qui tombe sur un bout de palier
Le tapis plain qui se décolle sous l’effet des saletés
La crasse aussi qui s’accumule autour des poignées de porte
L’usure du sol à l’entrée de l’ascenseur
L’horloge qui prend une seconde de retard toutes les deux heures
Les mauvaises langues diront qu’il ne connaît pas son métier
Vingt ans de service et pas encore usé
Vingt ans de service et puis remercié
Le Poète
Assis en tailleur devant la porte d’entrée
Ne laisse entrer personne
Ne les laisse plus sortir non plus
Il fait bouchon comme au fond de l’évier
Il huile les charnières avec son pus
Colmate la serrure et démonte la poignée
Écoute le brouhaha du bureau qui s’offusque
Puis retourne s’enfermer dans la corbeille à papier
Poète, on vous a foutu à la porte
Crie le patron avec des aisselles sous les bras
Et une cravate bon marché
J’y retourne j’y retourne
Crie le Poète qui ne bouge pas
Après avoir fabriqué des sabots pendant vingt ans
Je vais me mettre à saboter
Dit le Poète
A mi-voix
A ses collègues d’atelier
A ses collègues de déjeuner
A ses covoiturés
Ses camarades syndiqués
Ses ramoneurs de bénitiers
A tous ceux avec qui il a bossé
A sa plante de pieds aussi
Qu’il arrose avec abondance
Dans l’espoir de se voir pousser
Un vrai cri de détresse
Mais cela ne vient jamais
Le Poète parcourt les couloirs de l’entreprise
La tronçonneuse à la main
Plus il coupe des têtes plus il en repousse
C’est ainsi que va le monde du travail
Les travailleurs que tu vires par la porte
Reviennent par la verrière
Transformés en stagiaires
En quart-temps en points emploi en pause-carrière
Ils font la queue par derrière
Pendant que le patron par devant
Les remercie avec une poignée de main bien gluante
Il sue des doigts il sue des paumes
C’est pour cela qu’il porte le veston
Pour s’éponger la sueur du front
En toute discrétion
Le Poète a beau les décapiter
Il n’en a pas encore assez
Il veut un vrai feu d’artifice
Des tripes qui volent du sang qui pisse
Il bricole un peu les machines
Le tapis roulant les matières premières qui s’acheminent
Et les grandes lames tournantes
Il modifie la disposition
Des embauchoirs et des trieuses
Des laminoirs des emballeuses et du grand pal
Il sourit
Il aime sourire le Poète
Dans un silence de morgue en fête
Ils sont derrière lui le patron et le contremaître
Ils le regardent avec un air bête
Appuyer sur le petit bouton
Ils sont les premiers à voler dans la jolie machinerie
Que le Poète a fini de machiner
Happés par une courroie tirés par un crochet
La broyeuse les avale avec un bruit de pet
Qui résiste entre les fesses
Puis d’os qui craquent de crânes qui éclatent
Ce n’est pas beau à voir et c’est pire à entendre
Les collègues suivent le même chemin
Ça met un peu d’ambiance
Cette nouvelle mode du trash and carry
On se croirait à Walibi au pied d’une attraction
Tant ça hurle
Puisque le patron a montré le chemin
Ils y vont tous comme au turbin
L’un après l’autre à la découpe
Le Poète ne s’est jamais senti aussi poète
Qu’en contemplant les grands jets de sang
Sur le mur blanc et la verrière de l’entrepôt
Il lui reste encore une idée derrière la tête
On lui a dit de prendre la porte
Il allait l’oublier
Il court jusqu’à l’entrée la démonte de ses gonds
Il va montrer à ces cons qu’il est capable d’exécuter un ordre
Il se jette à son tour dans la machine à décerveler
Et ferme la porte derrière lui
Dans un sale bruit d’ossements brisés
Et de portes déclassées
Merde
Pense le Poète au moment où son cerveau explose
J’ai encore oublié d’éteindre la lumière
Et je suis parti le dernier
Ce n’est pas bon pour la planète
Ce texte a été publié dans le numéro de juillet 2009 du magazine "C4"
Il fait partie d'un chantier en écriture perpétuelle intitulé "Les aventures du poète", comme je l'ai expliqué ici.
16:22 Publié dans Liège, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : chômage, poésie, c4 | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
27/10/2012
Monsieur Delagare débarque à Liège le 1er novembre
Il est allumé comme un cierge, roucoule comme un pigeon, swingue comme un club de golf.
Qui ça ?
Monsieur Delagare & Cie !
Aurélien Rozo (aux guitares) et Mustapha Aouar (à tout le reste)
Le duo le plus chaloupé de la scène poétique de France.
Depuis des années, ils démontent mes textes, les absorbent et les recomposent en musique et en voix.
Ils seront en spectacle-concert le 1er novembre à 22h30 à Liège dans le chapiteau du Parc de la Boverie (sur le parking de l’hôtel Alliance).
L'entrée est gratuite pour les spectateurs qui ont déjà assisté à "L'homme qui valait 35 milliards" (sur présentation de votre ticket, quelle que soit la date), elle n'est que de 5 euros pour les autres (s'il en reste, à Liège, qui n'ont pas encore vu le spectacle).
Ils donneront à entendre ce soir là "Je me numérise", chatouilleries musicales sur des textes écrit sur mesure pour eux, avec aussi des bouts de "Burododo" (à partir de "Métro, boulot, dodo", éditions l'Arbre à Paroles) et des aventures du poète ("Le poète fait sa pub", éditions Maëlstrom ; "Le poète fait construire", éditions Fourre-tout ; "Le poète fait sur scène", éditions de la Gare).
"Poésies dites, le mot est faible, chantées seraient plus juste, mises en rythme, en chuintements, en murmures (...) par un fameux parleur"
JP Thibaudat, Rue89
"... jouissif avec de grands moments de rigolades kitsch punk... et une cigogne empaillée en guise d'effet final...."
NovaPlanet.com
A ne pas louper, ce 1er novembre !
19:54 Publié dans Liège, Poésie, Théâtre en cours | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : liège, l'homme qui valait 35 milliards, gare au théâtre, poésie, monsieur delagare, je me numérise | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
24/07/2011
Le Poète fait sur scène - fêtons le théâtre loin d'Avignon
A l'occasion du festival "Nous n'irons pas à Avignon" à Gare au Théâtre à Vitry-sur-Seine et pour célébrer le célèbre festival de théâtre (presque du même nom) dans la Cité des Papes en même temps (ben oui, on peut manger à tous les râteliers, quand on a la dent longue), voici un premier texte extrait du recueil "Le Poète fait sur scène" - les aventures du poètes, tome 3 (paru aux Editions de la Gare dans le livre "Sans faire de bruit sans faire de vagues".
Bonne lecture et bel été à vous !
Entrée en scène
On a vu le poète entrer
Dans une cabine téléphonique
C’est ce qu’on dit
Il n’en est pas sorti
Il n’en sort jamais
Il a cédé la place à un grand type costaud
Les cheveux longs les joues hirsutes
Avec une voix de cave qui réchauffe les femmes
Et un regard de braise qui les fait grésiller
Le poète a changé de rôle
Le voici comédien
Homme de théâtre dit-il
Comme on dit homme d’Eglise
Homme d’Etat homme du monde
Homme orchestre
Homme battu
Homonyme
Je me fonds dans la foule
Je me fais taximan je me fais violence
C’est pour sentir le rôle
Et le poète inspire une grande bolée d’air frais
Qui aère ses veines
Lui ventile le cerveau
Je ne suis plus qu’un homme objet
Au service du texte dit-il
Je suis un mot dans une phrase
Une phrase dans un très beau discours
Un discours dans la bouche d’un personnage
Un personnage perdu à la surface du monde
A un moment donné et vite repris
Par le torrent du temps
Je ne suis même pas ça dit le poète
Je suis une petite lettre un accent
Dans un mot du discours
D’un pauvre type sur la terre
Que je ne suis pas
Un quidam
Que je rêve à haute voix
C’est ça mon boulot de comédien
Dit le poète fort en verve
C’est comme ça que je suis désormais
Je me fonds dans la foule
Je me coule
Une pierre au fond de la rivière
Et j’observe
Le plus beau des silences
Un silence habité
Un silence qui vibre
Le silence de la scène
C’est mon silence à moi
Dit le poète
Accoudé au bar
Aux côtés d’une rousse à gros seins
Je suis comédien
Sans boulot pour l’instant dit-il de sa voix chaude
Mais j’observe le monde
Rien que dans ce décolleté
Et dans vos yeux
Je lis tout le tumulte
Toute la violence et la beauté
Du monde qui nous entoure
Evidemment si je pouvais voir plus bas
Plus loin encore
Ce n’est pas moi qui souhaite
C’est la méthode
Actor’s studio Stanislavski
Tout doit finir au lit c’est bien connu
Si je pouvais approfondir
Vous saisiriez
La mesure de mon talent
Et toute ma verve
Le poète à longs cheveux se prend un verre de Schweppes
Droit sur les joues bien drues
La rousse s’est défilée
Restent la bière et le bar
Les deux autres piliers
De la carrière d’acteur
10:30 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Poésie | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : avignon, gare au théâtre, théâtre, poésie, nicolas ancion, les aventures du poète | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
02/04/2011
Vases communicants : bienvenue à Arnaud Maïsetti
Demain, dis-tu — il fera jour
Demain, il fera jour
Au moins, le sais-tu : il fera lentement
Tu ajoutes — plus lentement encore
Jour. Il fera même
Sur nous qui passons
De la pluie sur le jour :
Peu importe — qu’il pleuve : le jour percera, se laissera voir : on ne verra
Que lui
Et puis
Jour sur jour : la vie se laissera recouvrir sans rien dire
Par le jour.
Non pas —
Non, pas du tout
Je dis, je refuse :
Car nos silhouettes élancées loin à présent
Je les vois déjà.
Et nos mains qui se serrent, je les vois, aussi.
Je vois d’ici où je suis, ce qu’elles deviendront : et je refuse ;
Elles seules sauront résister : resteront ici et maintenant.
Je le vois, le sais ;
Il faudrait qu’un les rattrape demain ; qu’un vienne et les rattrape
Mais si loin qu’on est, déjà, demain quand tous
Aujourd’hui meurent maintenant —
Nous qui demeurons —
Demeurerons à jamais
Oui.
Demain tu le sais, ce n’est pas de temps qu’il nous faut ;
Ce n’est pas de temps en temps ignorer ce qu’il faut, je dis :
Au jour mort qui suit immédiatement celui où l’on est
À présent meurt où l’on est ; qui le sait ?
Ta silhouette élancée sur le devant des cours,
La mienne qui rejoint
Des quais à peine mouillés au bruit des fontaines d’août — dans la question :
Qui sait si nous serons demain ?
Qui sait demain si nous serons à présent toi,
Et qui sait, toi, dans la morsure des corps qui se cherchent
Tant que le noir les trouve
Tant le noir pourrait trouver une épaule une bouche où s’épandre
Dans l’ombre d’un doute :
On dit qu’à ciel ouvert la nuit parait plus longue —
Qu’une robe froissée sur le lit si défait du fleuve
Y pourrait flotter peut-être — jusqu’à demain,
Une robe froissée aux fatigues de se donner : que j’ai refusée, mais pourquoi —
Si demain il fera jour,
Oh comme tu es loin ;
Demain il fera et
Je ne le désire pas ;
Le présent où je suis compte seul ;
Où je suis, ce que nous sommes :
Car demain n’est pas sûr :
Car demain n’est jamais sûr où tu es :
Demain deviendra quelque chose comme de l’aujourd’hui mal désiré mal éprouvé ;
Non, Plus de lendemain, Braise de satin, Votre ardeur
Est le devoir !
Et votre jour ce jour qu’en ce lieu j’ai dit
Au devoir de poussière
Mordu jusqu’à ne plus sentir qu’à mordre hier qui de vous ou de moi j’ai
La chair d’un jour sans lendemain mort né d’avoir été
Perdu
Comme un corps épuisé laissé sur ce lit ouvert, comme demain
Des paumes froissées en demandant : viens ; et de l’avoir dit
Comme on demande au lendemain de s’abattre —
Qu’on en finisse —
Qu’on me donne à boire, et : des baisers de sa bouche
Pour ajouter, demander :
Demain qu'aura-t-il de moins rude ? As-tu ce terme dans ta main ?
Et vois-tu quelque certitude D'arriver jusqu'à ce demain ?
Non — quelqu’un pose sa main sur la porte sans frapper.
Je n’ouvre pas.
J’attends.
Demain viendra peut-être.
Je serai toujours là.
Il me trouvera en même place, aujourd’hui.
Et de l’autre côté de la porte
Le bruit frôlé de la main
Restera seul hors ce qui comptait sur tout, ô le désir et son refus absolu d’y céder
Pour toujours.
Alors : de la main, tout le désir d’entrer là
Demeure quand moi, je reste l’instant dans l’instant planté :
Ta silhouette élancée en mémoire de moi
Tournera lentement la clé du jour rompu
Je ne dormirai pas.
Je veillerai ce jourd’hui jusqu’à plus soif.
Demain dis tu, il aurait fait jour. Il aurait pu faire jour si je ne m’étais pas autant entêté.
Quel orgueil.
Aujourd’hui je demeure et quand tout sera parti avec toi.
Quel jour de quelle heure me faudra-t-il tuer ?
Le temps de quelle minute pour pouvoir habiter
Demain qui s’efface déjà —
Texte d'Arnaud Maïsetti, hébergé dans la cadre de l'opération Vases Communicants, qui propose aux blogueurs littéraires d'échanger un texte entre blogs le premier vendredi du mois.
Cherchez donc #VasesCommunicants sur Twitter pour trouver d'autres textes.
Puis visitez les carnets d'Arnaud pour lire bien d'autres textes !
Et si vous êtes paresseux, voici la liste des blogs qui ont pris part à l'opération Vases Communicants en ce 1er avril :
Sandra Hinège http://ruelles.wordpress.com/ et Pierre Ménard http://www.liminaire.fr/
Anita Navarrete-Berbel http://sauvageana.blogspot.com/ et Christophe Sanchez http://www.fut-il.net/
Guillaume Vissac http://www.fuirestunepulsion.net et Laurent Margantin http://www.oeuvresouvertes.net/
Joachim Séné http://www.joachimsene.fr/txt/ et Marc Pautrel http://blog.marcpautrel.com/
Dominique Hasselmann http://dh68.wordpress.com/ et François Bon http://www.tierslivre.net
Michel Brosseau http://www.àchatperché.net/ et Stéphane Bataillon http://www.stephanebataillon.com/
Brigitte Célérier http://brigetoun.blogspot.com et Benoît Vincent http://www.erohee.net/ail/chantier/
Franck Queyraud http://flaneriequotidienne.wordpress.com et Samuel Dixneuf-Mocozet http://samdixneuf.wordpress.com/
Anne Savelli http://www.fenetresopenspace.blogsp... et Piero Cohen-Hadria http://www.pendantleweekend.net/
Christine Jeanney http://tentatives.eklablog.fr/ et Maryse Hache http://semenoir.typepad.fr/
Claire Dutrait http://www.urbain-trop-urbain.fr/ et Jacques Bon http://cafcom.free.fr/
Cécile Portier http://petiteracine.over-blog.com/ et Bertrand Redonnet http://lexildesmots.hautetfort.com/
Isabelle Pariente-Butterlin http://yzabel2046.blogspot.com/ et Jean Prod’hom http://www.lesmarges.net/
Christopher Selac http://christopherselac.livreaucentre.fr et Franck Thomas http://www.frth.fr/
Morgan Riet http://cheminsbattus.wordpress.com/ et Vincent Motard-Avargues http://jedelego.free.fr/
Marlène Tissot http://monnuage.free.fr/ et Murièle Modély http://l-oeil-bande.blogspot.com
09:55 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : vases communicants, arnaud maisetti, échange, littérature, poésie | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
01/04/2011
(Rond comme un ballon)
Il n’y a rien qui ressemble plus
À un joueur de foute
Qu’un joueur de foute
Rien qui ressemble plus à un gardien
Qu’un autre gardien ou un autre gardien
Ou un joueur de foute
Et la rumeur du stade derrière les commentaires
Est toujours identique
Quelles que soient les couleurs
Quels que soient les drapeaux
Exactement comme un poème
En noir sur la page si blanche
Ressemble à tous les autres poèmes
Et le silence est toujours le même
Entre les mots
Le froissement de la page qu’on tourne
La salive qu’on avale et la respiration
Il n’y a pas de clameur
Il n’y a pas de foule
Qui hurle pour les poètes
Et les commentateurs se taisent
Quand se tourne la page
On est toujours seul à écouter les mots
Comme le gamin perdu avec son beau ballon
Qui n’a plus qu’un copain pour jouer avec lui
C’est le mur de l’usine
11:00 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Poésie | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : foot, poésie, écriture, littérature, nicolas ancion | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
10/03/2011
Autant en emporte (si t'as plus de douze ans)
C’était Autant en emporte le vent
Cet après-midi là
Sur la télé slovaque
J’ai reconnu Clark Gable et Scarlett O’Hara
Un sigle en haut à droite
Interdisait le film aux moins de douze ans
Ils sont comme ça à la télé slovaque
Ils protègent leur audimat
Pour que dans douze ans ils puissent
Rediffuser les mêmes programmes
Certain que les plus jeunes ne les auront pas vus
Moi c’était la première fois que je voyais
Autant en emporte le vent en slovaque
Cet après-midi là
Je pense que je ne le reverrai pas
Dans douze ans
Et que je devais être trop jeune la dernière fois
J’aurais dû en profiter cette fois-ci
On n’est pas tous les après-midi
Devant la télé slovaque
Heureusement d’ailleurs
08:55 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Poésie | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : slovaquie, poésie, autant en emporte le vent, télévision | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
09/03/2011
Train de nuit
Le type à côté de moi a défait sa ceinture
Déballé son thermos
Bu deux tasses
Fouillé dans sa mallette
Il y a un cadenas rouillé
sur sa mallette en cuir
Elle est lourde il la traîne sur un diable
Pauvre type
Traîner le diable derrière soi
Ce n’est pas une vie
Dans sa mallette, le gilet fluorescent des cheminots, un mousqueton rouge qui dépasse, une bouteille d’eau pétillante et cette lettre qu’il sort puis déchire minutieusement.
Vous avez gagné à la loterie, dit-elle en flamand, vous avez été sélectionné pour la grande finale, vous êtes riche, vous êtes beau, vous êtes celui espérez être
Erreur
Vous êtes un autre
Vous êtes le voisin de train à la mallette
Beige en cuir cadenassé
Le cheminot à chemise bleue à cravate jaune
Vous êtes le type d'à-côté
Pas celui sur qui ça tombe mais l’autre
Celui qui y croit dur comme fer mais qui ne gagne jamais
Le type d'à-côté a délacé ses chaussures
Etendu ses jambes molles
Fermé les yeux
Il dort déjà le type d’à-côté
Et rêve à son enveloppe
Ou au monde qu’il inventerait s’il écrivait un peu
Demain il s’y mettra
Et moi aussi d’ailleurs
Demain, j’écris la fin du monde
08:48 Publié dans À lire en ligne, Poésie, Trucs en ligne que j'aime | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : train, poésie, cheminot, nuit, nicolas ancion, belgique | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
08/03/2011
La solitude, c'est toujours mieux à deux
Ça y est me revoilà assis
avec les doigts gelés
j’arrive à l’instant du froid
et je m’assieds
dans un machin qui ne bouge pas
c’est un restaurant je crois
il y a des gens attablés pas loin de moi
avec des airs de Polonais
en visite à la pizzeria
je me rends compte à quel point
ces textes sont dérisoires
pas vraiment des histoires
sans doute pas des poèmes
ma façon à moi de retenir le temps qui passe
de prendre des photos dégueulasses
avec les dents
et la mauvaise foi crasse
d’un grand enfant
j’avais envie de bouffe indienne
quelle drôle d’idée
à Varsovie
qu’à cela ne tienne
je n’en ai pas trouvé sur ma route
pourtant fort sinueuse
alors comme j’avais froid et faim
et qu’on peut mourir des deux
je suis entré au plus vite
dans ce boui-boui
fort respectable
et ça y est je suis assis
seul à ma table
on est toujours seul quand on écrit
d’ailleurs
c’est souhaitable
c’est pour ça qu’on écrit si peu
sans doute
parce que la solitude au bout du compte
c’est toujours mieux à deux
quoi qu’on raconte
08:45 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Poésie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : pologne, varsovie, poésie, nicolas ancion, littérature, solitude | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer