31/10/2016
L'odeur du papier imprimé
Aimer les livres n’empêche pas de dire et de penser des conneries. Ni même d’en écrire d’ailleurs. Bien au contraire.
Combien de fois ai-je lu, entendu, subi, la rengaine des amateurs de bouquins imprimés, prétendant qu’avec le livre numérique, on allait perdre l’essentiel : l’odeur du livre, le toucher des pages, le bosselé de l’encre sur le papier épais ou même la beauté des couvertures en quadrichromie glacée ? À chaque fois que ce refrain arrive à mes oreilles, il se superpose aux images tout droit sorties de ma mémoire, où la lecture est à jamais associée aux pages décolorées et ternes, au couvertures fanées et à l’odeur de tabac froid qui accompagne les romans d’occasion, quand ce n’est pas aux feuilles rabotées des collections reliées plein cuir de la bibliothèque des Chiroux, coupées si ras, façon coiffeur militaire, qu’il ne reste plus place dans les marges pour poser les doigts. Si je devais décrire les livres qui m’ont fait voyager pendant l’adolescence, les premiers mots qui me viendraient à l’esprit seraient sans doute : jaunâtres, poussiéreux et malodorants.
Oui, je l’avoue volontiers, la plupart des livres que j’ai dévorés puaient !
Si j’ai évoqué l’odeur de tabac froid, plus haut, c’est par respect pour les sensations des lecteurs de ce petit texte, car l’antre dans lequel j’achetais mes poches d’occasion, à l’entrée de la rue Saint-Séverin, sentait plutôt à la fois la vieille cave, le champignon et le renfermé que le cendrier trop plein. Le libraire colossal aux cheveux gras qui surveillait l’entrée par-dessus la couverture d’un livre auquel je ne prêtais aucune attention avait beau afficher en vitrine quelques vieux Tintin et l’une ou l’autre revue littéraire d’avant-guerre, il n’était pas à proprement parler bibliophile, plutôt – comme bien d’autres – bibliophage, voire biblio-dealeur, transformant sa librairie d’occasion en biblio-souk, en bibliothèque infinie où quelques heures de fouilles ne permettaient pas de sonder les trésors enterrés dans les profondeurs de ces étagères, de ces caisses et de ces bacs, dans les arrière-salles crasseuses, derrière les piles de magazines jaunis, parmi les dons à trier, les rebuts à composter, les livres à emporter. Pour parler de la douce odeur du livre imprimé, dans un taudis pareil, il aurait fallu se boucher les deux narines à la fois et avoir les yeux sérieusement à côté des orbites. (...)
Pour lire gratuitement la suite de cette nouvelle publiée cet automne par les éditions de la Province de Liège, dans le cadre de l'opération "C'est écrit près de chez vous", il suffit de suivre ce lien et de télécharger le fichier epub.
L'image qui illustre ce texte est tirée de ce blog. Ce texte a été écrit à partir de quelques témoignages de lecteurs recueillis en 2015 dans les bibliothèques de la Province de Liège. En plus de ce texte, n'oubliez pas de lire aussi les deux autres nouvelles, écrites par Katia Lanero Zamora et Luc Baba dans le même cadre.
15:42 Publié dans Ecriture, Trucs en ligne que j'aime | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : lecture, livre numérique, odeur, édition, livre, liège | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
23/09/2015
Dédicace au Théâtre de Liège ce 27 septembre après Blockbuster
L'automne s'annonce chaud brûlant.
Deux de mes romans arrivent en librairie : "Invisibles et remuants" chez MaelstrÖm RéEvolution et "L'ours intérieur" aux Editions de l'Hèbe.
En deux mots, L'ours intérieur a été écrit en 24h chrono au mois de juin, dans le charmant village de Charmey, en Gruyère. Que raconte ce roman, qui par un beau hasard, est le plus récent de tous ceux qui se publient en cette rentrée littéraire ?
Olivier aimerait partir en vacances le cœur léger, laissant le travail et le quotidien à la maison. Il n’a pourtant pas le choix, il va devoir finir de dessiner les planches de Zoé et Zelda dans la chambre d’hôtel, pendant que sa femme et ses deux enfants se doreront sur la plage. Il va devoir passer ses vacances à l’ombre, seul face à son ours intérieur qui le regarde d’un air mécontent. Seul face à son ours… sauf si le destin en décidait autrement.
Pour la petite histoire, Jean-Philippe Ayer et Eleonora Gualandris des éditions de l'Hèbe m'ont invité à écrire ce texte en marathon, pour fêter les vingt ans de la sortie, dans la même maison, de mon premier roman "Ciel bleu trop bleu". Et le roman est sorti en Suisse en même temps qu'était remis le PIJA, le Prix Interrégional Jeunes Auteurs, que j'ai remporté tout jeune, quand j'avais 17 et 19 ans... Tout le monde vieillit, mais le monde littéraire est tissé d'amitiés fidèles.
Et, puisqu'on parle de fidélité et d'amitiés, je suis ravi qu'Invisibles et remuants sorte chez MaelstrÖm, grâce au travail enthousiaste de Pascal Blondiau, d'abord, puis de David Giannoni et de Johan Soibinet, ensuite. Ca bouillonne en permanence chez MaelstrÖm et ce petit roman explosif y est parfaitement à sa place. De quoi est-ce que ça parle ? Mieux vaut laisser le dos du livre se présenter tout seul :
Deux romans, c'est déjà beaucoup, mais ce n'est pas fini. C'est aussi ce 27 septembre que le Collectif Mensuel créera au Théâtre de Liège la pièce "Blockbuster", que j'ai écrite avec toute l'équipe, à partir du roman dont on vient de parler plus haut. Le résultat est complètement fou, pille allègrement dans les grosses productions d'Hollywood pour les détourner sur scène.
Et pour relier le tout, ce dimanche 27 septembre, après la représentation de Blockbuster, je serai dans le grand hall du théâtre, à l'invitation de la librairie Livre aux trésors, pou dédicacer tout ça.
Bienvenue à toutes et tous !
Et bonne rentrée, avec ou sans bouquins.
18:00 Publié dans Ecriture, Liège, Rencontres publiques, Théâtre en cours | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : nicolas ancion, roman, théâtre, invisibles et remuants, l'ours intérieur, 24h chrono, édition, liège | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
24/06/2014
Figure d'auteur
Le titre n'est pas bon, je le reconnais tout de suite. Je n'ai pas envie d'en chercher un autre dans l'immédiat, désolé, c'est le contenu de cette note qui m'intéresse, pas son titre.
Et si j'écris ce matin (NdA : cette note a en réalité été écrite il y a deux ans et jamais publiée, je viens de la lire et de décider de la publier en 2014, tout colle assez bien, sauf l'allusion à ce matin, désolé, ce n'est plus le même) c'est à la suite d'une série de questions qui portent sur l'auto-édition, autour du refrain très souvent repris ces derniers temps :
« Que pensez-vous de l'auto-édition ? »
ou
« Que pensez-vous de l'édition à compte d'auteur ? »
Avant l'ère numérique, ma position était très claire : pas question de payer pour publier un livre. Si un éditeur demande à l'auteur de contribuer, c'est qu'il ne fait pas son métier, point final. Le débat s'arrêtait là. Par conséquent, un auteur qui acceptait le compte d'auteur ou l'auto-édition, à mes yeux, était un sous-auteur, un réprouvé ou un imbécile, soit qu'il avait été refusé partout et finissait par payer pour imprimer lui-même son texte, soit qu'il était trop bête pour comprendre la farce éditoriale dont il était le dindon.
En clair, donc :
avant, c'était très simple
Compte d'auteur = arnaque
Auteur auto-édité = pigeon
Livres auto-édités = bouquins à éviter
Précisons tout de même : si je méprisais complètement les ouvrages publiés par cette voie, je n'encensais pas pour autant tout ce qui était publié à compte d'éditeur, je vous rassure. Il s'imprimait bien des merdes à bon nombre d'exemplaires, là n'est pas la question, d'ailleurs
Depuis l'arrivée d'Internet et des outils de diffusion en ligne, tout cela s'est compliqué. Dès 1997, j'ai ouvert mon site (à l'époque, hébergé gratuitement sur Geocities.com, jusqu'à ce que l'hébergeur disparaisse avec tout mon contenu en ligne puis sur iBelgique.com, où l'histoire s'est répétée) et j'ai publié des textes en ligne. De fait, je m'auto-éditais pour ces textes-là. Je ne vendais rien du tout, je me contentais de diffuser, d'offrir, de partager.
Et là, tout d'un coup, ça ne m'embêtait pas d'être à la fois l'auteur et l'éditeur. Fallait surveiller l'orthographe, lire et relire, prendre de la distance et, bien entendu, tendre l'oreille pour tenir compte des commentaires des nombreux lecteurs en ligne. La masse de lecteurs remplaçait efficacement les compétences des quelques lecteurs professionnels d'une maison d'édition qui nettoient les textes avant leur publication.
Pourtant, aujourd'hui, quand je vois nombre d'auteurs publier eux-mêmes leur romans en ligne, sur Amazon, sur l'Apple Store, sur leurs sites, leurs blogs et passer leurs journées à faire de la pub sur les réseaux sociaux, je sens qu'il manque quelque chose d'essentiel.
Non, pas l'éditeur. Franchement, avec une bonne équipe coopérative (voir l'édition interdite de Crouzet, par exemple), on peut réunir les mêmes compétences pour retravailler le texte.
Non, ce qui manque, c'est la figure d'auteur.
J'ai déjà expliqué en détail qu'à mes yeux un auteur n'est pas simplement une femme ou un homme qui écrit (relisez cette note, tiens, par exemple), qu'il faut autre chose aussi.
Je pense surtout qu'un auteur n'est pas un vendeur de livres. Ni hier ni aujourd'hui. L'auteur est celui qui rédige le texte, qui le pense, qui le mûrit, qui le triture, qui le pétrit puis qui le polit.
Qui le lit par la suite, qui en discute, qui le défend.
Mais jamais celui qui le vend, non.
Les gens qui vendent des livres sont des libraires et des éditeurs.
Les auteurs écrivent des textes.
Les auteurs aiment les donner à lire mais ils ne sont pas là pour les commercialiser.
Cela me semble du moins incompatible avec la figure de l'auteur, ce petit conglomérat imaginaire de qualités qui constitue un écrivain à mes yeux.
Quelles qualités devrait-on y trouver ?
En vrac :
- la distance et le recul par rapport au monde ;
- le bonheur d'écrire ;
- le plaisir de discuter de mots, de langue, d'histoires, de personnages et de bouquins ;
- l'attention aux rythmes secrets qui secouent les phrases, au trébuché des mots, à la saccade des idées et au déferlement des images ;
- le goût du partage, de la discussion, de l'approximation et du paradoxe qui aident à mieux cerner l'inconnu, à apprivoiser l'inacceptable ;
- un culte infini pour les histoires et leur magie toute puissante ;
- la certitude permanente d'être un incapable qui fait de son mieux ;
- et ainsi de suite...
Nulle part, là-dedans, je n'ai envie de faire rentrer des compétences commerciales. Un auteur n'est pas un bon vendeur, en tout cas pas un bon vendeur de ses propres œuvres.
Autant un auteur peut me donner l'envie d'en lire un autre (rien de plus contagieux que la passion d'un auteur pour l'œuvre d'un autre écrivain), autant, l'auteur en séance d'auto-promotion, forcé de souligner son propre génie me dégoûte, me repousse, me terrifie.
L'auteur n'est pas là pour encenser son propre travail. Il est là pour douter de ce qu'il fait et tenter d'améliorer ses textes. Il ne s'engage pas à vendre davantage à chaque nouveau titre, il s'engage juste à aller plus loin plus profond et plus fort. A aller là où il n'est jamais allé lui même.
Il écrit mais ne vend pas.
Il peut partager, offrir, échanger. Pas promouvoir.
Voilà pourquoi j'ai tant de mal aujourd'hui avec les auteurs auto-édités : leurs manœuvres pour pêcher les lecteurs (pour attirer le chaland, pour accroître leur chiffre d'affaire) sont incompatibles avec l'image que je me fais d'un auteur. Elles les discréditent définitivement à mes yeux.
Arrivé au bout de cette note, je me rends compte que je ne sais toujours pas vraiment ce qu'est un auteur. Dans mon cas, c'est sans doute tout simplement quelqu'un qui parle trop.
Un bavard.
Oui, c'est ça, un bavard qui, incapable de se taire, fait passer son vice pour de la littérature.
18:06 Publié dans Ecriture | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : autoédition, numérique, compte d'auteur, publication, édition | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
03/10/2012
Le Pape a disparu : de retour sur vos écrans !
La littérature en ligne n'en est pas à ses balbutiements, loin de là. Il y a plus de dix ans, déjà, c'est-à-dire très précisément entre l'année 2000 qui achevait le millénaire précédent et l'an de grâce 2002 qui la suivit de peu, j'ai publié toutes les semaines ou presque, un nouvel épisode d'un roman-feuilleton intitulé « Le Pape a disparu ». On pouvait recevoir le texte par mail ou le lire sur le site Internet de Luc Pire Electronique, on pouvait même l'imprimer si on en avait envie, on faisait ce qu'on voulait, c'était du texte numérique...
Les années ont passé et l'éditeur Luc Pire Electronique a disparu dans les tréfonds du nuage numérique, ainsi que le site qui avait hébergé le roman. Le texte n'était plus disponible.
Depuis hier, il fait son grand retour sur toutes les plate-formes de téléchargement, dans une toute nouvelle édition relue et corrigée, chez Onlit Editions (C'est d'ailleurs un plaisir pour moi de participer ainsi à la même rentrée littéraire numérique que Patrick Delperdange et Serge Coosemans, je le signale au passage.)
Qu'y a-t-il donc dans ce livre ?
« Le Pape a disparu » n'est pas un simple roman : c'est une version remixée d'un classique de la littérature pour adolescentes des années 50.
En musique, il est habituel de voir un tube réinterprété, trituré, malaxé par d'autres artistes, pour toucher de nouveaux publics. En littérature, le remix est beaucoup plus rare. Il est même exceptionnel.
Le respect du texte, la vénération de l'auteur, la sclérose générale dans laquelle la littérature se complaît empêchent de jouer avec les œuvres, de se les réapproprier.
Au mieux se permet-on aujourd'hui de rééditer les textes classiques avec de nouvelles couvertures ou de nouvelles illustrations, certains auteurs allant parfois jusqu'à - quelle hérésie ! - adapter des romans en bande dessinée !
A la fin du siècle dernier, j'ai eu envie, avec les moyens dont je disposais, d'aller un peu plus loin.
Comment peut-on remixer un roman ?
J'ai tout simplement pris un roman qui m'avait beaucoup plus quand j'étais ado, je l'ai scanné page par page, ce qui, je l'avoue m'a pris pas mal de temps. Je l'ai passé entièrement à la reconnaissance optique puis, à partir du fichier texte, je me suis laissé aller : j'ai changé le personnage principal et j'ai regardé ce qu'il advenait de l'histoire racontée.
Je n'ai donc pas entièrement écrit ce livre : je l'ai réécrit. À partir d'une trame, de personnages, de lieux, de phrases et de rythmes qui préexistaient.
Je me suis beaucoup amusé et j'ai l'impression que les lecteurs à l'époque de la diffusion en ligne s'amusaient beaucoup eux aussi.
Une nouvelle vie pour un texte disparu
Aujourd'hui, les moyens de diffusion numérique permettent de rendre ce roman accessible sur tous les appareils de lecture : sur votre téléphone, votre ordinateur, votre liseuse, votre tablette numérique.
Deux clics et c'est parti, pour 4,99 EUR le livre est à vous, vous pouvez le dévorer.
Le lire et le relire, le faire passer de votre tablette à votre PC, de votre smartphone en forme de pomme à votre vieux Commodore 64 tiouné.
Vous n'avez jamais lu de livre numérique ?
C'est l'occasion rêvée de vous y mettre car ce titre n'arrivera jamais en papier chez votre libraire.
Et les droits, là-dedans ?
Quand j'ai publié le roman-feuilleton en ligne il y a dix ans, je n'avais l'autorisation de personne : l'éditeur original avait fait faillite, l'auteur écrivait sous pseudonyme et était décédé, je n'avais aucun moyen d'entrer en contact avec les ayants-droit.
Puis le hasard d'un article en ligne, puis le site d'un collectionneur bien informé m'ont permis, via Facebook et les mails, d'entrer en contact avec les enfants de l'auteur. Je leur ai présenté mon projet, ils ont eu l'occasion de lire le texte, ils m'ont donné leur accord. Ce livre-ci n'est donc plus un bootleg mais un remix officiel.
Qu'ils en soient mille fois remerciés.
09:26 Publié dans Ecriture, Livres en cours, Trucs en ligne que j'aime | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pape, roman, livre numérique, littérature, ebook, onlit, édition, rentrée littéraire | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
09/06/2012
Numérisation des indisponibles : lettre de Bernard Blanc au Président
Depuis quelques mois, la loi sur la numérisation des oeuvres indisponibles indispose bon nombre d'auteurs, dont je suis. J'ai déjà eu l'occasion de m'en expliquer à plusieurs reprises.
Ce matin, j'ai reçu copie d'une lettre adressée au nouveau Président de la République par Bernard Blanc.
Comme elle me semble aussi pertinente que bien tournée, je lui ai demandé l'autorisation de la diffuser ici. C'est donc avec grand plaisir que je vous la communique.
Et merci à Bernard pour ce joli courrier. J'espère de tout coeur qu'il recevra les suites qu'il mérite.
Lorgues, le 6/6/2012
Monsieur le Président,
Je vous parlais, hier, de la question des droits d'auteur qui bloquent la diffusion de chefs-d'oeuvre du cinéma français. Je vous fais confiance pour trouver une solution à ce problème. Hélas, cette même question empoisonne aussi l'existence des écrivains et des traducteurs littéraires.
En effet, la loi du 22 février 2011 permet désormais à une Société de perception et de répartition des droits, créée avec des fonds publics (on parle de 50 millions d'euros) d'assurer une rémunération aux éditeurs et aux auteurs grâce à la numérisation de tous les textes publiés avant le 1er janvier 2001 indisponibles en version papier. Cette société est autorisée à les remettre en vente et ce, sans que les auteurs ou leurs ayants-droit en soient informés. Il leur faudra surveiller régulièrement une base de données pour s'y opposer. Si le jour où l'une de leurs œuvres épuisée est numérisée ils sont en train de boire un coup à la plage ou de travailler à un autre livre en Sibérie, tant pis pour eux, ils n'avaient qu'à être plus vigilants ! À leur retour, à eux d'engager une procédure longue et coûteuse avec un bon avocat pour s'opposer à cette violation du droit d'auteur et du Code de la Propriété intellectuelle.
Bien sûr, il est essentiel d'assurer l'édition numérique de toutes les œuvres du XXème siècle. C'est notre patrimoine, et il doit rester à la disposition de tous. Mais pas sur le dos des auteurs ou de leurs ayants-droit ! Il n'est pas acceptable qu'un éditeur décide de ne plus exploiter une œuvre papier et soit rémunéré à égalité avec l'auteur quand un texte tombe sous la loi du 22 février 2011. En gros, le patron ferme l'usine, mais il continue à toucher un pourcentage sur l'allocation chômage de ses ouvriers – j'aimerais savoir ce qu'en pense Mr Arnaud Montebourg, Ministre du redressement productif !
Et si je décide de distribuer gratuitement un de mes livres dont j'ai récupéré les droits ? La société qui gère tous les textes indisponibles en version papier publiés avant le 1er janvier 2001 me fera un procès ? Monsieur le Président, on marche sur la tête, là. C'est l’auteur – ou, à défaut, ses ayants droit – qui décide seul d’une nouvelle diffusion de son œuvre. Tout éditeur – numérique ou papier – qui souhaite exploiter à nouveau l'œuvre en question doit d'abord lui proposer un contrat.
Le 22 février 2011, l'État français a légalisé le piratage. Je vous prie de demander à votre Ministre de la Culture (à laquelle j'envoie une copie de cette lettre) d'abroger tout simplement cette loi et de chercher, en concertation avec les auteurs et les éditeurs, un moyen plus décent de remettre en circulation les œuvres littéraires et les traductions introuvables en version papier.
Dans l'attente, recevez, Monsieur le Président, l'assurance de mes meilleurs respects.
Bernard Blanc
21:20 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Trucs en ligne que j'aime | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : indisponibles, numérique, littérature, édition, livre, bernard blanc, ministre | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
Interview sur les droits d'auteurs et le numérique
J'ai eu le plaisir de répondre aux questions de Stéphanie Michaux, du site Lettres Numériques, à propos des bouleversements amenés par le numérique dans la sphère éditoriale. Cette brève interview a fait pas mal de vagues hier. Elle a été reprise par le site Actualitte.
Je vous glisse ici le début du dialogue, à vous d'allez lire la suite sur l'un des deux sites si vous le souhaitez. Et j'espère que le débat pourra alors avancer sereinement, sur les questions importantes.
N'hésitez pas à réagir, ici ou sur le site Actualitte ou via Facebook ou Twitter.
Bonne lecture et à bientôt !
Pour commencer quel est l’impact du numérique pour les auteurs et notamment l’exploitation de leurs œuvres ?
Dans un contrat d’édition, auteur et éditeur s’accordent sur les modalités de gestion totale des droits patrimoniaux d’une œuvre qui concerne aussi bien les droits de traduction, de merchandising ou d’adaptation cinématographique. S’ils disposent de ces droits, les éditeurs ne les exploitent que très peu. Avant le numérique, l’éditeur était contractuellement tenu d’assurer la mise en vente des ouvrages. Aujourd’hui, non seulement, les contrats incluent une clause sur l’exploitation numérique des ouvrages, mais les formulations ont été revues et l’éditeur se doit d’assurer une diffusion commerciale en continu des œuvres de l’auteur. Autrement dit, et c’est comme ça que je le perçois, la seule possibilité qu’avait un auteur pour résilier un contrat d’édition en évoquant le fait que le livre papier était épuisé, est à présent caduque.
C’est une conséquence directe de l’arrivée du numérique : les clauses juridiques se complexifient et engagent les auteurs et les éditeurs sur un partenariat quasiment à vie. Les auteurs ne peuvent plus se séparer d’un éditeur dont ils ne sont pas satisfaits et les éditeurs souhaitent disposer de l’ensemble des droits d’exploitation d’une œuvre même s’ils dorment dessus. J’en ai fait l’expérience. Un éditeur a par exemple refusé de me racheter les droits d’un de mes titres parce qu’il avait fait l’objet d’une adaptation sous la forme d’une application pour iPhone. Le contrat n’a pu être signé que lorsque l’application a été retirée du catalogue d’Apple.
Selon vous, quelle devrait être la durée d’un contrat d’édition ?
Je ne me prononce pas en faveur d’un contrat d’auteur qui s’applique 70 ans après la mort de l’écrivain, c’est une première chose. Ensuite, je pense qu’un contrat d’édition qui couvrirait une période entre 7 et 10 ans serait préférable. Tout d’abord, il obligerait l’éditeur à bien faire son travail et à envisager toutes les exploitations possibles de l’œuvre. Ce contrat serait, qui plus est, reconductible et permettrait une meilleure relation entre les deux parties. Je m’explique : tous les 7 ans, l’auteur et l’éditeur se reverraient, feraient le bilan et décideraient ensemble de la suite des évènements.
08:16 Publié dans À lire en ligne, Ecriture, Édition numérique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : édition numérique, édition, nicolas ancion, droit d'auteur, interview | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
14/03/2011
Auteurs, lecteurs, éditeurs et bibliothécaires sans DRM
Non, les DRM (ces restrictions de droits, sous forme de verrous sur les fichiers numériques, qui vous empêchent de copier un livre numérique de votre PC à votre liseuse, ou de le donner à un ami après lecture, par exemple) ne sont pas une nécessité.
Non, copier un fichier pour le donner à lire à un lecteur intéressé n'est pas un acte de piraterie.
Le livre numérique peut circuler sans DRM, il doit même le faire s'il veut vivre longtemps.
Afin de vous faire entendre, diffusez ce symbole anti-DRM, dans vos ePub, sur vos sites et vos blogs.
Affichez le logo et montrez votre opposition à ces systèmes de protection qui entravent le bon usage d’un ebook, gâchant l’expérience de lecture et font du lecteur contagieux un pirate.
Vous êtes lecteur, éditeur, bibliothécaire ?
Vous trouverez sur le site eBouquin les différents logos téléchargeables qui vous correspondent !
15:58 Publié dans Ecriture, Trucs en ligne que j'aime | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : édition numérique, lecture, écriture, édition, drm, liberté | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer
26/04/2010
Combien gagne un éditeur ? Et ses auteurs ?
J'écris plus cette note de blog pour le gag que pour ouvrir un vrai débat mais j'ai été intrigué ce matin par un lien sur un sitez web qui annonçait "Combien gagne un éditeur ?". Info intéressante, sauf qu'il s'agissait d'un éditeur de revues spécialisées, en Flandre, et que, comme ses revenus sont de 3000 euros nets par mois, on lui demande à quoi il les dépense.
À vrai dire, la somme importe peu. La vraie réponse est tout simplement dans la question qu'on ne pose pas : pourquoi les éditeurs sont-ils professionnels alors que les auteurs ne le sont pas (ou très minoritairement) ? Pourquoi, dans l'édition professionnelle, tout le monde est-il payé pour son travail, sauf l'auteur, qui est payé au résultat (18 mois après les ventes, en général) ?
De ce point de vue, je préfère les éditeurs amateurs, qui, comme leurs auteurs, consacrent du temps à leur passion et sont ravis quand ça marche. S'ils reçoivent des subventions, elles sont entièrement investies dans la fabrication des livres. Problème, tout de même : comme je vis de l'écriture, tant bien que mal, je dois bosser avec les professionnels de l'édition. Et la question de leur salaire m'intéresse donc car 3000 euros nets par mois, comme auteur, je n'ai jamais eu ça en trois ans de métier, même exceptionnellement !
13:01 Publié dans Ecriture | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : revenus, écrivain, auteur, éditeur, édition, euros | | del.icio.us | | Digg | Facebook | | Imprimer