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18/10/2012

Avis de tempête numérique sur le livre à Montpellier

Flyer-Recto-10X15_web11.jpgCe samedi 20 octobre, à 14h45 très précises, j'aurai le plaisir de m'empoigner avec Thierry Crouzet sur le sujet le plus couru des salons littéraires (juste après les 50 nuances de grèset les ventes de Marc Musso) : l'avènement de la littérature numérique.

Cela se passera à la salle Pétrarque de Montpellier, dans le cadre très hype de la Zone d’Autonomie Littéraire organisée par la remuante revue Squeeze.

Comme nous sommes des gens organisés, polis et policés, nous avons même accepté de dévoiler un peu le sujet du débat : « Il s’agira de traiter des effets pervers possibles/probables du numérique sur la qualité littéraire et donc, par extension, d’en considérer également les aspects positifs et de donner quelques recettes de survie. L’auteur devient une sorte de héros tragique, luttant contre les vents contraires. »

Pour nous remettre de ces émotions, après l'affrontement, nous écrirons un peu en direct à partir de tableaux (ça détend toujours, surtout si les tableaux sont bien morts, sinon, il faut leur courir après et c'est fatigant) et nous signerons deux ou trois millions de livres aux foules massées. Ou nous écouterons du slam, des performances oratoires, des lectures détricotées et tout ce que l'on trouve, sans trop forcer, dans une vraie Zone d’Autonomie Littéraire.

Si vous êtes dans le coin, n'hésitez pas : l'entrée est gratuite, les découvertes assurées et les rencontres spontanées.

A samedi, donc !

Le Show et le Froid dans Trends-Tendances

Ce n'est pas tous les jours qu'on est invité à rencontrer le Manager de l'année et à dialoguer avec lui de l'avenir de l'industrie dans l'Europe qui se vide de son travail et, plus particulièrement, de la fin de la phase à chaud chez ArcelorMittal.

C'est exactement ce que m'a proposé le magazine Trends-Tendances, à la sortie d'une des représentations de "L'homme qui valait 35 milliards" au Mamac de Liège par le Collectif Mensuel.

J'ai volontiers accepté.

Voici le début de l'article :

 PhotoTrends.jpgLe Show et le Froid

«Trends-Tendances» a invité deux Liégeois au théâtre pour les forcer au débat. A droite, François Fornieri, CEO de Mithra Pharmaceuticals et Manager de l’Année 2011. A gauche, Nicolas Ancion, romancier prolifique et auteur de «L’homme qui valait 35 milliards» qui vient d’être adapté au théâtre. Précision utile: l’intrigue met en scène l’enlèvement du magnat Lakshmi Mittal par un artiste déboussolé... (Frédéric Brébant)

Pari hautement réussi par la troupe Collectif Mensuel qui joue en ce moment au théâtre l’adaptation du roman L’homme qui valait 35 milliards du Belge Nicolas Ancion. Un roman «socio-économique»
qui ose l’enlèvement spectaculaire du grand patron de l’acier Lakshmi Mittal par un artiste au chômage et ses deux acolytes dont l’un vient justement d’apprendre son licenciement du géant ArcelorMittal en terre liégeoise.
Rarement une pièce de théâtre aura été en telle connexion avec l’actualité brûlante du secteur économique.
A l’heure où les Liégeois ont définitivement tiré un trait sur la phase à chaud de leur patrimoine sidérurgique et que la phase à froid semble toujours menacée, voilà que le Musée d’Art moderne et d’Art contemporain de Liège accueille dans ses murs cette mise en scène audacieuse qui porte la réflexion sur le capitalisme et l’avenir des cités industrielles.
Evidemment, selon que l’on soit patron ou syndicaliste, l’approche d’un tel kidnapping théâtral sera analysée avec plus ou moins de «compréhension». Et c’est précisément pour susciter le débat que Trends-Tendancesa invité au théâtre deux personnalités liégeoises aux sensibilités forcément différentes : Nicolas Ancion, auteur du roman sulfureux qui a donné naissance à la pièce en question, et François Fornieri, patron de l’entreprise Mithra Pharmaceuticals et Manager de l’Année 2011. Réactions à chaud à la sortie du spectacle...

Pour lire la suite, c'est-à-dire le dialogue entre le Manager de l'année 2011 et votre humble serviteur rendez-vous chez votre libraire !

Et pour voir le spectacle à Liège jusqu'au 3 novembre, voici le calendrier !

05/10/2012

L'homme qui valait 35 milliards : du roman à la scène

Homme qui valait 35 milliards, Lakshmi Mittal, Arcelor Mittal, Liège, théâtre, nicolas ancion

Et voilà, nous y sommes presque : ce mardi 9 octobre 2012, après de longs mois de préparation, d'écriture et de répététitions, le Collectif Mensuel créera dans les murs du Musée d'Art Moderne et d'Art Contemporain de Liège (MAMAC) la version scénique de "L'homme qui valait 35 milliards".

Les représentations auront lieu du 9 octobre au 3 novembre à Liège, puis le spectacle tournera beaucoup, notamment à Charleroi, Courtrai, Lille, Monpellier, Turin et au Luxembourg... Tous les renseignements et le calendrier sont disponibles ici.

Pour ceux qui auraient loupé un épisode, la pièce, comme le roman, raconte comment un artiste platsicien et quelques copains kidnappent Lakshmi Mittal, le patron du groupe ArcelorMittal, pour se venger en grandeur nature de la fermeture des hauts-fourneaux à Liège et de la mise à pieds de près de 10000 personnes dans une ville déjà bien endommagée par la crise économique des quarante dernières années.

Je ne veux pas vous dévoiler ce que vous verrez sur scène, puisque je le découvrirai moi-même ce mardi soir. Je peux juste vous dire que la pièce est entièrement interprétée par trois comédiens et deux musiciens, que la musique y prend une grande place et que le cinéma s'y invite avec une projection surprise en plein milieu du spectacle. Pour vous donner un avant-goût, voici la bande annonce de la pièce :

 

Si vous avez envie qu'on se retrouve lors des représentations, je peux déjà vous confirmer que je serai présent au MAMAC pour les représentations du 9 au 13 octobre et du 31 octobre au 3 novembre.

En particulier, je participerait à une rencontre avec les spectateurs à la fin de la représentation du mercredi 10 octobre, pour discuter, notamment, de la façon dont l'histoire est passée du papier à la scène.

Je serai aussi là le jeudi 11 octobre pour une séance de signature du roman, organisée par la libraire Livres aux trésors, avant et après la réprésentation.

Enfin, vous pouvez déjà le noter, le jeudi 1er novembre, la représentation sera suivie par une première en Belgique : Monsieur Delagare en personne viendra chanter et triturer les textes de Burododo, tiré de Métro, boulot, dodo et d'autres recueils poétiques que j'ai pondus. Comme l'entrée est gratuite, venez nombreux écouter cela en chair et en os !

Ultime info, n'oubliez pas que le roman est plus que jamais disponible en librairie ;-)

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03/10/2012

Le Pape a disparu : de retour sur vos écrans !

La littérature en ligne n'en est pas à ses balbutiements, loin de là. Il y a plus de dix ans, déjà, c'est-à-dire très précisément entre l'année 2000 qui achevait le millénaire précédent et l'an de grâce 2002 qui la suivit de peu, j'ai publié toutes les semaines ou presque, un nouvel épisode d'un roman-feuilleton intitulé « Le Pape a disparu ». On pouvait recevoir le texte par mail ou le lire sur le site Internet de Luc Pire Electronique, on pouvait même l'imprimer si on en avait envie, on faisait ce qu'on voulait, c'était du texte numérique...

Les années ont passé et l'éditeur Luc Pire Electronique a disparu dans les tréfonds du nuage numérique, ainsi que le site qui avait hébergé le roman. Le texte n'était plus disponible.

pape,roman,livre numérique,littérature,ebook,onlit,édition,rentrée littéraireDepuis hier, il fait son grand retour sur toutes les plate-formes de téléchargement, dans une toute nouvelle édition relue et corrigée, chez Onlit Editions (C'est d'ailleurs un plaisir pour moi de participer ainsi à la même rentrée littéraire numérique que Patrick Delperdange et Serge Coosemans, je le signale au passage.)


Qu'y a-t-il donc dans ce livre ?

« Le Pape a disparu » n'est pas un simple roman : c'est une version remixée d'un classique de la littérature pour adolescentes des années 50.

En musique, il est habituel de voir un tube réinterprété, trituré, malaxé par d'autres artistes, pour toucher de nouveaux publics. En littérature, le remix est beaucoup plus rare. Il est même exceptionnel.
Le respect du texte, la vénération de l'auteur, la sclérose générale dans laquelle la littérature se complaît empêchent de jouer avec les œuvres, de se les réapproprier.

Au mieux se permet-on aujourd'hui de rééditer les textes classiques avec de nouvelles couvertures ou de nouvelles illustrations, certains auteurs allant parfois jusqu'à - quelle hérésie ! - adapter des romans en bande dessinée !

A la fin du siècle dernier, j'ai eu envie, avec les moyens dont je disposais, d'aller un peu plus loin.

 

Comment peut-on remixer un roman ?

J'ai tout simplement pris un roman qui m'avait beaucoup plus quand j'étais ado, je l'ai scanné page par page, ce qui, je l'avoue m'a pris pas mal de temps. Je l'ai passé entièrement à la reconnaissance optique puis, à partir du fichier texte, je me suis laissé aller : j'ai changé le personnage principal et j'ai regardé ce qu'il advenait de l'histoire racontée.

Je n'ai donc pas entièrement écrit ce livre : je l'ai réécrit. À partir d'une trame, de personnages, de lieux, de phrases et de rythmes qui préexistaient.

Je me suis beaucoup amusé et j'ai l'impression que les lecteurs à l'époque de la diffusion en ligne s'amusaient beaucoup eux aussi.

 

Une nouvelle vie pour un texte disparu

Aujourd'hui, les moyens de diffusion numérique permettent de rendre ce roman accessible sur tous les appareils de lecture : sur votre téléphone, votre ordinateur, votre liseuse, votre tablette numérique.
Deux clics et c'est parti, pour 4,99 EUR le livre est à vous, vous pouvez le dévorer.

Le lire et le relire, le faire passer de votre tablette à votre PC, de votre smartphone en forme de pomme à votre vieux Commodore 64 tiouné.

Vous n'avez jamais lu de livre numérique ?

C'est l'occasion rêvée de vous y mettre car ce titre n'arrivera jamais en papier chez votre libraire.

 

Et les droits, là-dedans ?

Quand j'ai publié le roman-feuilleton en ligne il y a dix ans, je n'avais l'autorisation de personne : l'éditeur original avait fait faillite, l'auteur écrivait sous pseudonyme et était décédé, je n'avais aucun moyen d'entrer en contact avec les ayants-droit.

Puis le hasard d'un article en ligne, puis le site d'un collectionneur bien informé m'ont permis, via Facebook et les mails, d'entrer en contact avec les enfants de l'auteur. Je leur ai présenté mon projet, ils ont eu l'occasion de lire le texte, ils m'ont donné leur accord. Ce livre-ci n'est donc plus un bootleg mais un remix officiel.

Qu'ils en soient mille fois remerciés.

25/06/2012

Je suis l'Europe

Ce n'est pas moi qui le dis, c'est Chilly Gonzales, en 2010. Et, chaque fois que je tombe sur la chanson par hasard sur Deezer, les paroles me trottent dans la tête, alors je vous les refile, parce qu'on a rarement rédigé un aussi joli portrait du continent sur lequel nous nous débattons :

I’m a dog shaped ashtray
I’m a shrugging moustache wearing a speedo tuxedo
I’m a movie with no plot
Written in the back seat of a piss powered taxi
I’m an imperial armpit, sweating Chianti

I’m a toilet with no seat, flushing tradition down
I’m socialist lingerie, I’m diplomatic techno
I’m gay pastry and racist cappuccino
I’m an army on holiday in a guillotine museum
I’m a painting made of hair, on a nudist beach
Eating McDonald’s
I’m a novel far too long, I’m a sentimental song
I’m a yellow tooth waltzing with wrap around shades on
Who am I? I am Europe

Et en version sonore, ça donne ceci :

Achève-moi sur le bord de la route

Quand on écrit les premières lignes d'une histoire, on sait rarement comment elle va finir. On met les personnages en place, on leur jette deux ou trois bâtons dans les roues, puis on les regarde se débattre et s'en sortir tant bien que mal.

Lors de la première rencontre au Collège Pasteur de Lavelanet, j'ai proposé aux élèves d'inventer la suite d'une de mes nouvelles et de l'achever à leur manière.

Ils sont tous partis de la même situation : un personnage marche la nuit sur le bord d'une nationale, un bidon d'essence à la main. Il se dirige vers une station-service et pourtant son bidon n'est pas vide.

Que fait-il là ? Quel idée a-t-il en tête ? Comment s'est-il retrouvé dans pareille situation ?

Voilà quelques unes des questions auxquelles les élèves de Lavelanet ont répondu, à travers leurs histoires à rebondissements et à révélations. À vous de découvrir leur travail, à présent, si le cœur vous en dit. J'aime autant vous mettre en garde tout de suite : ces filles et ces garçons ne manquent pas d'imagination, vous vous embarquez pour un redoutable voyage !

Achève-moi sur la route.pdf

Atelier d'écriture, Lavelanet,

Bonnes lectures ! Vos commentaires sont les bienvenus sous cette note, surtout si vous avez envie de féliciter les auteurs en herbe...

SUITE : les textes écrits par les élèves ont été lâchés dans la nature à Lavelanet, notamment accrochés à des ballons gonflés à l'hélium. Voici la photo :

atelier d'écriture,lavelanet,collège pasteur,nicolas ancion,a l'école des écrivains,achève-moi

 

PS : A la fin du recueil, vous pourrez aussi découvrir la fin de la nouvelle que j'avais imaginée de mon côté. Ce texte, ainsi que sept autres, servait de démarrage à un concours d'écriture intitulé Achève-moi. Pour plus d'infos, n'hésitez pas à visiter : www.achevemoi.be

PPS : les ateliers d'écriture et la rencontre ont eu lieu au printemps 2012 dans le cadre de l'opération "A l'école des écrivains" coordonnée par la Maison des Ecrivains. Plus d'infos ici !

22/06/2012

Ventes d'eBooks aux USA : belle progression mais tout de même...

édition numérique,sne,littérature,usaJe suis un peu étonné de lire les titres hyperboliques qui annoncent par exemple que " les ebooks ont dépassé les livres reliés sur le territoire américain !" (titre de la newsletter de Lettres Numériques reçue ce matin) et je leur préfère des accroches plus pondérées comme "l'ebook réalise près de 30 % des ventes du 1er trimestre" (sur Actualitte.com) car si vous regardez le tableau de près (il est disponible dans les deux billets cités), vous verrez qu'aux USA on distingue les livres à couvertures rigides et les livres à couverture souple, une nuance importante puisque tout ça, chez nous, sont des livres papier (et certains souples sont des poches, d'autres seraient inclus chez nous dans le grand format).

La seule conclusion qu'on peut tirer de ces chiffres, c'est donc que le numérique progresse aux USA à vitesse grand V et que sa part de marché a dépassé au premier trimestre celle des livres à couverture rigide.

De là à dire qu'il se vend désormais plus de livres en numérique qu'en version imprimée, il y a vraiment un pas que seule une méconnaissance de la langue anglaise et du marché du livre anglo-saxon permet de franchir.

Il me semblait important de préciser cela.

J'ajouterais également que le livre numérique offre un marché mondial aux livres américains. Ceux qui ont acheté un Kindle d'Amazon, par exemple, savent à quel point il est facile d'acheter en un clic un roman américain récent et commencer la lecture dans la foulée, alors qu'un lecteur québécois doit encore attendre des semaines, voire des mois, pour se faire livrer à prix d'or un exemplaire papier du roman qui le tente, importé depuis la France, la Suisse ou la Belgique.

Le marché francophone dans son ensemble reste largement à la traîne. Les éditeurs historiques, après avoir raté le train de l'édition numérique en 1999-2000, ont préféré tenter de faire interdire les gares en France plutôt que monter dans le train en marche.

On peut rire aujourd'hui en regardant les VRP du SNE courir à toutes jambes après le TGV, leurs valises pleines de lourds livres imprimés bien encombrants. On se dit qu'on est mieux assis dans le train, avec un PC sur les genoux, une tablette sans clavier (vous voyez, genre iPad mais moins cher, ou iPad pour ceux qui sons sensibles au marketing d'Apple), une liseuse ouverte ou un Kindle bien fermé, à télécharger des livres directement des USA.


13:47 Publié dans Édition numérique | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : édition numérique, sne, littérature, usa | |  del.icio.us | | Digg! Digg |  Facebook | |  Imprimer

20/06/2012

Qu'est-ce qu'un écrivain aujourd'hui ?

écriture, écrivain, définition, syndicat, professionnalisation, nicolas ancionJ'aurais voulu choisir pour ce billet un titre plus accrocheur, une phrase qui soit une affirmation plutôt qu'une question. Mais depuis des semaines, alors que l'idée d'écrire sur ce sujet surgit régulièrement au cours de mes ruminations, je me rends compte que chaque réponse que je peux apporter à cette question entraîne une nouvelle série d'interrogations. Par conséquent, la forme interrogative me semble convenir assez bien à ce billet un peu mal foutu.

 

À défaut de trouver un titre qui claque et une idée lumineuse qui bouscule toutes les autres, empoignons le sujet par un de ses bouts, un peu au hasard, celui-qui vient le plus spontanément à l'esprit.

 

Un écrivain est quelqu'un qui écrit.

 

Oui, cela va de soi. Mais cette réponse est si évidente qu'elle empêche de vraiment comprendre la question. Dans notre monde industrialisé où la scolarité est obligatoire, 80% des gens écrivent, ne fut-ce que la liste des commissions ou des textos par tombereaux entiers. Il faut écrire pour être écrivain, on est bien d'accord là-dessus mais suffit-il d'écrire ?

Prenons un peu de recul et sortons un moment de la littérature. Dirait-on d'un architecte que c'est quelqu'un qui dessine des maisons ? Oui, certainement, mais il ne suffit pas que je dessine les plans d'un cabanon à ériger dans le fond de mon jardin pour devenir architecte. Un architecte est quelqu'un qui dessine des maisons, professionnellement, pour des clients et qui en supervise la réalisation. Voilà qui est déjà plus complet. Je lis une différence essentielle avec la première proposition : l'architecte est un professionnel, ce qui ne l'empêche ni de dessiner des plans sans se faire payer, s'il en a envie, ni de concevoir un cabanon dans le fond de son jardin. Vous voyez où je veux en venir.

Allons-y pour une seconde tentative.

 

Un écrivain est quelqu'un qui écrit professionnellement.

 

J'entends déjà les cris de récrimination parmi les lecteurs de ce blog ! Vivre de l'écriture mais c'est (au choix:)

- de la prostitution (l'art est plus beau quand on le tient à l'écart des notions mercantiles, tout le monde sait ça)

- du boulot de mercenaire (quand on écrit sur commande, on met sa plume au service d'un projet, on se compromet fatalement, on détourne le contenu pour plaire aux commanditaires, aux lecteurs, aux généreux donateurs publics)

- de l'asservissement (écrire, c'est la liberté, vivre de l'écriture, c'est donc l'esclavage).

 

Chacune de ces objections mériterait une réponse détaillée. Vais-je prendre le temps de le faire ? Mais oui. Pourquoi pas ? Allez, c'est parti.

 

Première idée reçue à démolir : vivre de l'écriture est avilissant. Les œuvres produites par pur plaisir sont d'une qualité supérieure à celles produites contre rémunération.

Alors là, je me marre. Imaginez un instant le même genre de discours sur la peinture ou la réalisation de cinéma ? Kubrick aurait réalisé de meilleurs films en amateur et Van Gogh n'aurait peint que des croûtes s'il avait vécu dans le confort. Cela ne tient pas debout.

Un écrivain qui peut consacrer tout son temps à l'écriture atteint, ne serait-ce que par l'énergie et la concentration qu'il mobilise, un rapport avec son texte tout autre que celui qui s'y met le soir, après avoir bossé toute la journée, donné le bain aux enfants et préparé le repas... Je vois mal qui pourrait contester cela. Le fait qu'on le paie pour écrire – et si possible qu'on le paie bien – n'implique pas que son travail soit moins intéressant.

Entre nous, c'est la misère matérielle qui use pour de bon un artiste. Quand on angoisse parce qu'on ne sait pas ce qu'on va bouffer à la fin du mois, quand on a les huissiers au cul, on n'écrit pas. On boit, on fuit, on fume, on broie du noir avec un moulin à café, on cherche du boulot, de l'argent, n'importe quoi pour s'en sortir. Quand on est payé pour écrire, on peut y consacrer le meilleur de soi-même. C'est du moins ce que je pense. Payez-moi grassement et vous verrez que vous en aurez pour votre argent.

 

Deuxième idée reçue à massacrer : le travail de commande dévoie la vraie inspiration de l'artiste. Autant dire, si l'on reprend l'exemple de la peinture, qu'on peut bazarder tous les peintres jusqu'au XIXe siècle à peu près : difficile d'en trouve un seul qui n'ait pas bossé sur commande, à la demande des mécènes, sur des sujets imposés. Portraits d'aristocrates, scènes bibliques, décorations pour les nantis de toutes les époques. Que dire alors des architectes, dont le talent précisément, se déploie quand ils parviennent à la fois à respecter les contraintes qu'ils ne maîtrisent pas et à déployer leur créativité ? En écriture, pourquoi entretient-on depuis si longtemps (ceci dit, « longtemps », dans ce cas, ça ne fait que deux siècles) le mythe de l'inspiration spontanée, romantique, qui viendrait souffler l'idée originale à l'oreille du poète et du romancier ? J'ai ma petite idée là-dessus et j'y reviendrai.

 

Troisième idée reçue qui me fatigue : la vraie liberté c'est écrire sans contraintes. Quelle sinistre philosophie ! Si la liberté ne se loge que là où il n'y a pas de contraintes, autant dire qu'il n'y a pas beaucoup de liberté sur cette planète. La liberté, c'est tout simplement ne pas accepter de regarder les choses comme on nous propose de les voir. C'est ma définition, du moins, mais je l'aime beaucoup. La liberté, c'est fourrer de l'imaginaire là où le commun des mortels ne voit que la réalité toute terne. Je parle d'imaginaire, d'autres utiliseront le mot poésie, je pense pour ma part que la poésie n'est qu'une des formes de l'imaginaire (mais j'accorde bien volontiers le droit à qui le souhaite d'affirmer que l'inverse est tout aussi vrai, que la poésie englobe tous les imaginaires, et, dans la foulée, de l'appeler 'pataphysique s'il le souhaite).

Je peux être libre à tout moment, en tous lieux, si je parviens à trouver un moyen de respecter les règles mais autrement. De contourner les règles en les respectant. C'est tordu mais exaltant. J'aime faire cela, je pense que c'est ce que je fais quand on me demande d'écrire un texte sur mesure. Si ce que j'écris correspond au résultat que j'imaginais avant d'écrire, c'est que j'ai perdu mon temps. Si le texte final s'est aventuré là où je ne pensais jamais mettre les pieds, alors c'est que je suis passé du côté de la littérature.

 

Bon, je pourrais me défouler un peu plus en profondeur sur ces trois idées que j'entends sans cesse autour de moi, mais j'ai envie d'avancer sur la question de départ : un écrivain est quelqu'un qui écrit professionnellement.

 

Le paradoxe, c'est que l'écrivain n'est pas considéré comme un professionnel par la plupart des gens qu'il côtoie.

 

Par exemple, les éditeurs. Ces braves professionnels de la fabrication et de la vente de livres considèrent qu'ils doivent rémunérer professionnellement tout le monde dans a chaîne du livre, depuis le metteur en page, les correcteurs, les attachées de presse, le coursier, le personnel d'accueil au téléphone, le distributeur, ses représentants. Tout le monde... sauf l'auteur, qui ne touchera pas de rémunération en fonction de son travail mais suivant le succès du livre (qu'il ne vend pas, je le rappelle). Vendre des livres, c'est pourtant le travail de l'éditeur et du libraire, pas celui de l'auteur. L'auteur vend des textes à des éditeurs qui les transformeront en livres, notamment, mais aussi en version radiophonique ou théâtrale, par exemple, ou encore en livre numérique, en feuilleton dans la presse, etc. C'est du moins ce qui est convenu dans le contrat d'édition classique, de plus en plus raboté par les auteurs - qui signalent, à juste titre, que les éditeurs se contentent de faire des livres et rien de plus - et étendu par les éditeurs - qui se plaignent de ne plus gagner leur vie, sans noter au passage que les auteurs, eux, ne la gagnent plus depuis longtemps.

 

Mais bon nombre d'organisateurs de salons du livre et de colloques littéraires, eux aussi (alors que leur métier consiste justement à créer des événements autour des auteurs et des livres, qui sont leurs deux matières premières) considèrent qu'il n'est pas nécessaire de payer un auteur pour venir signer ou donner une conférence. Aux yeux de ces drôles d'organisateurs culturels, les auteurs sont toujours en tournée promotionnelle. Même si les écrivains sont de bonne volonté pour défendre les livres qu'on édite sur base de leurs textes, ils ne sont pas taillables et corvéables à merci. Ils ne sont pas payés pour écrire, pas payés pour promouvoir leur livre, ils ne sont pas payés pour...

Ils ne sont pas payés, voilà tout.

 

Et, pourtant, à mes yeux, un écrivain est bien quelqu'un qui vit de son écriture. Le défi est de taille et j'admire d'autant plus tous ceux et celles qui osent le relever.

 

Vivre de son écriture, cela implique de faire de l'écriture le centre de sa vie. Cela implique de trouver une solution inédite au problème de la rentrée des sous. Chacun invente sa formule : on peut être rentier et avoir tout le temps du monde devant soi, simplement un peu fortuné et dilapider petit à petit son avoir, ou, plus communément, fauché et bosser comme un chameau pour s'en sortir, en combinant, comme un bon cancérologue, tous les moyens à disposition pour atteindre son objectif.

 

C'est cette voie que j'ai choisie. Je l'assume.

 

Être écrivain, à mes yeux, c'est être chef de sa propre entreprise d'écriture. La maîtriser de bout en bout.


C'est non seulement écrire mais aussi calculer, investir, réfléchir, innover, pour éviter les fins de mois qui coincent et les pannes d'écriture, les idées répétitives et les formules toutes faites, les voies trop empruntées et les déserts de solitude.

 

J'adore mon métier, je le trouve d'autant plus passionnant que personne n'a de recette à me donner pour me guider.

 

Je suis juste un peu étonné d'entendre que certaines personne se prétendent « auteur » et avouent ne pas s'intéresser à leurs contrats ni aux enjeux du numérique, ne rien comprendre à la publication en ligne ou aux droits de traduction. « Tout ce qui m'intéresse, c'est l'écriture et mes lecteurs », entend-on parfois. Comme si un architecte avouait ne pas aimer superviser des chantiers ou un cinéaste ne pas s'intéresser à la production de ses films.

 

Ecrire, aujourd'hui est un métier qu'il faut assumer professionnellement : cela implique de négocier les contrats, de réfléchir aux rapports de force avec les éditeurs, de trouver, une fois de plus, des solutions inventives pour se sortir indemne et triomphant des contraintes imposées. Agir en professionnel avec des propositions alléchantes pour les lecteurs, les éditeurs et les libraires. Pour les lecteurs d'aujourd'hui et ceux de demain. La tâche est titanesque, c'est pour cela qu'elle est passionnante.

Un écrivain est plus que jamais un type qui écrit et qui, comme tout bon professionnel, regarde le futur bien en face avant de lui planter son stylo dans l'œil.


Sur ce, je retourne à mes cahiers et je vous embrasse sur les deux fesses.